“Baby”, la série Netflix sortie en 2018, est plus demandée que 82,4 % des titres dramatiques en France. Sa popularité ne l’a pas épargnée, d’un scandale à son lancement. Exactement comme la vraie histoire dont est inspiré son scénario.
Dès la publication de la bande-annonce de la série, la presse italienne en a fait un sujet de polémique. Selon de nombreux conservateurs, cette production glorifie la prostitution adolescente. Les éducateurs, journalistes et parents craignaient que “Baby” suscitent l’envie chez les jeunes de vendre leur corps pour s’offrir des vêtements de marque.
Les trois saisons de la série retracent le parcours de deux adolescentes, bien que vivant au sein d’une famille aisée, se sentent vides et finissent par sombrer dans la prostitution. Elles vivent cette activité comme une aventure.
Au-delà de ce scandale, cette série Netflix propose une analyse de la vie de la jeunesse actuelle. Elle montre comment les mauvais choix réalisés en étant jeunes peuvent causer de graves dommages dans le futur.
“Baby”, une série Netflix inspirée de faits réels
Juin 2015, 11 personnes sont condamnées pour relations sexuelles avec mineures par la justice italienne à un an de prison et des amendes. Dans la même affaire, huit personnes, dont Mirko Ieni et Nunzio Pizzacalla, écopent respectivement de dix ans et de sept ans de prison pour proxénétisme.
Ils étaient accusés dans l’affaire nommée “Baby Squillo”, prostitution infantile en français. Il s’agit d’un scandale révélant, en 2014, un réseau de prostitution d’adolescentes issues du quartier aisé de Parioli à Rome en Italie. L’alerte a été donnée par la mère d’une jeune fille qui sera nommée Angela, inquiète de la source de revenus de l’adolescente alors âgée de 16 ans.
La police découvre qu’Angela et une de ses amies, Agnese (14 ans) vendaient leur corps pour s’acheter des vêtements de marque et des appareils électroniques dernière génération. Elles gagnent entre 500 et 600 euros par jour, ou 300 euros par « prestation ».
À l’origine, juillet 2013, les deux jeunes filles s’étaient rendues en ligne et ont saisi “argent facile” comme requête dans leur moteur de recherche. Elles tombent sur une annonce en ligne de Leni et de Pizzacalla qui deviendront plus tard leurs proxénètes ainsi que ceux d’une douzaine d’autres filles. Ces derniers ont aménagé un appartement de deux chambres pour que les filles puissent rencontrer des clients après l’école.
Une liste de 50 clients masculins, parmi lesquels des personnalités influentes, est révélée par la police. Ils étaient attirés par la jeunesse de ces filles.
Si la mère d’Angela a appelé la police, celle d’Agnese l’a encouragée à continuer dans la prostitution. La police découvre une conversation téléphonique dans laquelle l’ado supplie sa maman de la laisser s’absenter du travail.
Elle ne pouvait plus se concentrer sur ses études et ne se sentait pas bien. La mère lui suggère alors « d’étudier deux ou trois heures avant ou après le travail » ou « d’alterner les journées ».
Agnese aidait financièrement sa mère, célibataire et sans argent, à payer ses factures. Elle sera condamnée à six ans de prison pour proxénétisme, 20 000 € d’amende et déchue de tous ses droits parentaux.
Dans la série Baby de Netflix, l’alter ego d’Angela sera Chiara (Benedetta Porcaroli) et Agnese, Ludovica (Alice Pagani).
Comment Netflix a adapté les évènements à l’écran pour “Baby” ?
Les créateurs de Baby ont reconnu que la série se rapprochait d’événements réels sans relater fidèlement le scandale.
Outre les deux personnages principaux inspirés de la polémique de 2014, on retrouve un large éventail de personnages secondaires démontrant le mode de vie des jeunes en Italie et dans le reste du monde.
À travers les épisodes, on découvre comment les jeunes essaient d’être transgressifs sans mesurer les conséquences de leurs actes. Ce qui peut les conduire à une vie beaucoup plus misérable.
L’héroïne, Chiara, rêve de faire de la course à pied et d’étudier en Amérique avec sa meilleure amie Camilla et leur copain Fabio. Elle se lie d’amitié avec Ludovica, qualifiée de « mauvaise fille » pour avoir filmé un acte sexuel avec un ancien petit ami.
Chiara commence à sécher les cours, fait la fête tard le soir et se met à dos ses anciens amis ainsi que ses parents. Elle découvre aussi que son père et sa mère sont fonctionnellement séparés et ne vivent ensemble que pour son bien temporaire.
Au fur et à mesure que l’histoire avance, Chia et Ludo mènent une double vie pleine de secrets, dominée par Saverio et Fiore, les équivalents de Leni et de Pizzacalla.
Pourquoi la série “Baby” de Netflix a-t-elle fait scandale ?
La première raison pour expliquer le scandale de Baby est liée aux faits que la série s’est inspirée d’une sordide affaire de prostitution de mineures. Reproduire ces événements à l’écran ne pouvait que susciter une nouvelle polémique si on tient compte du tollé suscité par l’affaire “Baby Squillo” en Italie.
NCOSE, le centre américain contre l’exploitation sexuelle, a vivement critiqué “Baby”. Il a affirmé que la série normalise les abus sexuels sur les enfants et le trafic sexuel de mineurs en tant que prostitution.
Lors d’une projection de deux épisodes de la série, le réalisateur Andrea De Sica a déclaré : « Nous avons essayé d’être aussi fidèles que possible à leurs conflits et à leurs choix », parlant des jeunes. « Ce que vous avez vu n’est pas une chronique d’événements réels, mais c’est à vous de tirer vos conclusions ».
L’un des scénaristes, Salvador, a assuré que la série est finalement « une histoire d’amour, mais pas de prostitution. »
« La première chose que nous recherchons toujours, c’est l’authenticité, et cette série en est dotée », a déclaré Kelly Luegenbiehl, vice-présidente de Netflix International Originals.
Lorsqu’on suit la série, on peut être frappé, voire frustré face aux affreuses caricatures de ses parents. Portraits d’une immaturité dangereuse alors que leurs enfants sont pris avec leur propre maturité.
Pourquoi regarder “Baby”, la série Netflix ?
En plus d’un scénario déjà palpitant, “Baby compte un casting d’acteurs talentueux et utilise une technique supérieure à la moyenne. Sous la direction d’Andrea De Sica et Anna Negri, la série est visuellement bien composée. Les créateurs ont su maintenir le suspense et la tension dans des scènes clés, qui révèlent beaucoup plus que ce que l’on voit littéralement à l’écran.
“Baby”, la série Netflix, montre tout son drame sur les conséquences des choix réalisés en étant jeunes. Tout cela est montré avec malice par les producteurs. Même si certains épisodes gardent un rythme lent, elle constitue un bon drama ajouté dans le catalogue Netflix.
Surtout qu’elle intègre tous les critères d’une série d’ados à succès :
- Parents castrateurs ;
- Intrigue amoureuse ;
- Jalousies ;
- Univers de lycée.
Les adolescents pourront découvrir, entre autres, les dangers liés aux réseaux sociaux comme la publication de leurs photos dénudées à leur insu.
La prostitution des adolescents entre-t-elle en jeu ? Absolument, mais jamais comme le centre d’intérêt ou l’obsession d’une histoire qui veut absolument jouer sur les deux tableaux. Les scénaristes et réalisateurs ne souhaitaient pas donner à “Baby” le genre de lascivité d’Élite, un autre drama Netflix.
Outre les caractères punk et la bande-son à forte teneur en synthétiseurs, “Baby” n’exhibe presque jamais ses jeunes acteurs séduisants. Elle évite complètement la nudité et ne montre jamais rien qui puisse réellement heurter la foi des plus pudiques.
Cela va peut-être jusqu’à basculer vers l’autre extrême, celui où la « prostitution adolescente » n’est considérée comme une étape banale sur le chemin de la rébellion.
“Baby” est une série Netflix à regarder pour vous replonger dans l’adolescence ou voir vos alter ego aux prises avec leurs mauvais choix si vous êtes adolescent.